Royan
L’arrivée de la Famille Tasiemka en Charente Inférieure
Les documents consultés aux archives départementales de Charente-maritime permettent de retrouver la date de l’arrivée de la famille Tasiemka en Charente inférieure.
Photographie de Royan sous l’Occupation, Archives départementales de Charente – Maritime
Lettre adressée en 1940 par le commissariat de police de Royan au préfet de Charente-inférieure issue du dossier de renouvellement de papiers d’identité d’Abraham Leib Tasiemka, Archives départementales de Charente -Maritime
Elle a eu lieu le 23 décembre 1939. Comment alors ce déplacement vers Royan a-t-il été vécu ? Comment la famille Tasiemka et les autres Mosellans ont – ils été accueillis ?
L’article « la question du repliement exceptionnel de l’agglomération messine » de Patrick J. Schaeffer nous livre à ce sujet de précieux renseignements :
L’intégration des réfugiés messins semble avoir été difficile. Ils ont souffert moralement de leur déplacement, « les réfugiés ont le spleen ». Les conditions d’accueil posent aussi problème. Sur le plan scolaire par exemple « la situation est la plus délicate à Royan où deux institutrices doivent s’occuper des quatre classes installées. ».
Leurs vies à Royan
Que savons-nous précisément de la vie de la famille Tasiemka à Royan ?
Des lettres échangées entre la préfecture de Charente inférieure et le commissaire de police nous livrent quelques indications.
Documents issus du dossier de renouvellement de papiers d’identité d’Abraham Leib, Tasiemka, Archives départementales de Charente-Maritime
Carte de Royan, issue du site géoportail.gouv.fr
Abraham Tasiemka a perçu une allocation de réfugiés pour lui et sa famille, ainsi qu’un logement gratuit :
- Le montant de l’allocation était de 45 francs par jour.
- L’adresse était : Villa « Emirazal » Avenue de Bordeaux à Royan, Pontaillac. Royan étant une ville de villégiature, la plupart des villas sont vides à cette période de l’année
Abraham a perdu son allocation dès qu’il a trouvé un emploi de peintre à l’entreprise de travaux publics Maison Barrière et Neau à Royan.
Il a été recruté le 20 mai 1940. Son salaire était de 6 francs par heure.
Attestation signée par l’employeur et par le maire pour compléter le dossier daté du 15 juillet 1940 certifiant l’emploi d’Abraham Tasiemka dans cette entreprise, en tant que peintre depuis le 20 Mai 1940, Archives départementales de Charente-Maritime
Pour mieux comprendre ce qu’ont vécu les enfants Tasiemka lors de leur passage à Royan, il peut être intéressant de faire appel au témoignage de Robert Frank. Celui-ci était un enfant juif, d’un âge proche des enfants Tasiemka, qui comme eux, est parti de Metz dans le même train et est allé à Royan. Nous pouvons donc penser que beaucoup de choses sont similaires entre ce que nous révèle l’histoire de Robert Frank et celle des Tasiemka.
Dans le livre « Les enfants du silence, mémoire d’enfants cachés » son témoignage peut nous faire comprendre ce qu’ont pu vivre Adolphe, Anna, Régine et Marie. « Notre famille s’est retrouvée à Royan. Nous y sommes restés onze mois. Après l’arrivée des Allemands en juin 1940, j’ai servi de traducteur dans les grands magasins de la ville. Un jour, un nazi maigre au visage émacié et portant des lunettes m’a demandé « d’où je savais l’allemand ». Je lui ai répondu que j’étais lorrain. Il m’a dit « Tu es juif ». J’ai pris la fuite et j’ai eu très peur ».
Au-delà du témoignage de Robert Frank, que savons-nous du sort de l’ensemble des familles juives à Royan à cette époque ?
Dans un article « « Administration et répression sous l’Occupation : les « Affaires juives » de la préfecture de Charente inférieure » écrit par William Guéraiche on peut lire ceci :
– « Au premier recensement d’octobre 1940, la communauté juive est estimée à 1218 personnes. La plupart des Juifs qui se trouvent en Charente-Inférieure lors de l’arrivée des troupes d’occupation font partie des 13 ou 14000 réfugiés, en grande majorité en provenance d’Alsace-Lorraine ».
– « Le commissaire de Royan qui effectue le pointage à la date du 17 octobre 1940 recense 88 familles dans l’agglomération dont 51 étrangères. Elles proviennent toutes ou bien de Turquie (Constantinople) ou bien d’Europe centrale. »
Le temps du départ
Un visa déposé aux archives de Charente évoque le déplacement d’Abraham de Royan vers Angoulême en date du 14 Novembre 1940. Sa famille part à son tour le 23 novembre 1940.
Ce départ s’inscrit dans un contexte particulier. Les Juifs sont obligés de quitter la côte Atlantique déclarée « zone interdite aux Juifs ». Ils ne peuvent emporter que le strict minimum avec eux.
Recensement, mairie de Royan, Décembre 1940, Archives départementales de la Charente-Maritime